dimanche 13 janvier 2013

La dévaluation : un projet des "souverainistes" au détriment du pouvoir d'achat des travailleurs



Gael Lagadec, professeur d'économie à l'UNC, a publié en janvier une étude sur la dévaluation du Franc CFP.



Nous ne porterons pas de jugement a priori sur ce document.

Mais sur la question de la dévaluation nous avons au MRC une opinion claire: nous sommes pour la défense du pouvoir d'achat de tous les Calédoniens et nous nous opposons donc à toute mesure qui y porterait atteinte, ce qui est le cas de la dévaluation du Franc CFP.

Il n'y a aucune raison aujourd'hui de dévaluer le Franc CFP, et de très nombreuses raisons d'éviter aux Calédoniens d'en subir les conséquences dramatiques.

Le modèle économique de la Calédonie est simple: nous vendons du Nickel qui nous permet d'importer l'immense majorité de nos biens de consommation courante.

Le tissu industriel local reste limité à des niches et il n'y a pas besoin d'avoir fait Harvard pour savoir que nous importons nos voitures, notre essence, une grand part de notre alimentation. Il en est de même pour toute une série d'équipements et de machines nécessaires au bon fonctionnement de nos entreprises. 
Notre électricité est générée seulement en partie par l'hydroélectrique et l'éolien.
Nous sommes en fait dépendants à plus de 95% d'importations d'hydrocarbures pour la fabrication de notre électricité (source ISEE)
Nous avons un système de santé de pays développé parce que nous sommes capables d'attirer des médecins de métropole avec des salaires appropriés.

Par ailleurs, si les Calédoniens peuvent emprunter de l'argent auprès des banques locales, c'est en partie grâce à l'argent qu'elles-mêmes empruntent en Euro en métropole. La Calédonie a une position nette extérieure de 90 Milliards qui est notre besoin en ressources financières extérieures.

Les projets du médipôle, les programmes de logements sociaux de la SIC, sont financés par des emprunts en Euros auprès d'institutions financières extérieures.

Dévaluer le Franc CFP cela veut dire amputer immédiatement le pouvoir d'achat des Calédoniens et renchérir le prix de tous nos biens essentiels.

Imagine-t-on que du jour au lendemain nos voitures, notre essence, nos aliments importés puissent coûter 50% ou 100% plus cher ?
Que les Calédoniens ne puissent plus partir en voyage comme aujourd'hui en Australie, en Nouvelle-Zélande, en France ?
Que nos enfants n'aient plus les moyens de partir aux études ?
Que nos médecins s'en aillent et que nous n'ayons plus les moyens de partir en évasan ?
Qu'avec des emprunts extérieurs en Euros, le poids de la dette des ménages et des collectivités soit instantanément multiplié et donc qu'il faille faire des coupes sombres dans nos projets privés et collectifs, ne plus acheter de maison, ne plus acheter de voitures, ne plus faire de logements sociaux ?

Quel raisonnement peut justifier un tel appel au désastre social et économique ?

Cette idée ne vient pas de l’Etat, ni des entreprises locales, ni même de l’IEOM qui a démenti à plusieurs fois les rumeurs sur le sujet.

L'idée de la dévaluation est avant tout motivée par l'idéologie «souverainiste» qui voudrait que le niveau de vie des Calédoniens soit amputé pour pouvoir se passer de la solidarité financière Française qui s'exprime au travers des transferts de l'Etat. 

Cette idéologie est notoirement soutenue à l'UNC par Mathias Chauchat, sympathisant indépendantiste, qui a une forte influence sur les orientations du corps enseignant de cette institution.

Non seulement cette théorie aura des conséquences socio-économiques dramatiques, mais elle aura à terme une autre conséquence : l'explosion des inégalités.

En effet dévaluer les salaires réels en dévaluant la devise locale, c'est payer les travailleurs moins et faire gagner plus d'argent aux patrons, notamment les entreprises minières qui vendent du minerai ou du Nickel en dollars.

La dévaluation créera ainsi un système à deux vitesses avec des salaires pour expatriés, et des salaires de pays sous-développé pour les locaux. 

Evidemment les modes de consommation seront à l'identique, à l'image de ce que l'on peut déjà observer au Vanuatu.

Au final, cette idée de la dévaluation ne vise pas à rendre notre économie plus compétitive, puisque nous n'exportons pas de biens de consommation. 

Elle vise à satisfaire un projet indépendantiste au détriment du pouvoir d'achat de la population.

mercredi 9 janvier 2013

Les indépendantistes veulent contrôler la SLN mais au profit de qui ?

par Philippe Blaise



Je ne partage pas les vues des indépendantistes et de certains concernant la prise de contrôle de la SLN par les politiques locaux.



Si une prise de participation significative de la Nouvelle-Calédonie est nécessaire pour différentes raisons, dont un droit de regard sur la distribution de la Valeur Ajoutée et le respect de la responsabilité sociale et environnementale de cette entreprise, le passage à 51% est un leurre.



Je ne défends pas la SLN. Je pense qu'elle doit payer son électricité au juste prix et que le Gouvernement a raison de s'opposer à la centrale au charbon.


Mais pour autant, je pense que l'intérêt général de l'économie calédonienne, et donc de la population Calédonienne elle-même, passe par une économie fondée sur l'initiative privée, et non par une économie revisitant des vieux fantômes socialistes, comme on essaie de nous en persuader.

Contrairement à ce que font croire les indépendantistes en Province Nord, KNS a pour actionnaire de référence Xstrata, une multinationale privée qui maîtrise la technologie, le capital humain, les marchés. C'est Xstrata qui a financé majoritairement le projet et en conséquence recevra une quote-part proportionnelle des dividendes donc supérieure à son pourcentage facial au capital social.
Certains se plaisent à le nier mais c'est bien comme cela que le montage financier est prévu. (*)
La SMSP comptait sur des dividendes miracles de son usine de Corée pour augmenter sa participation, mais finalement elle aura dû emprunter 20 Milliards à l'AFD pour pouvoir détenir une participation toujours très minoritaire au financement, et donc aux dividendes.

De la même façon, la SLN n'a aucun avenir si elle n'est pas gérée par un actionnaire de référence industriel. Seul un opérateur industriel de taille internationale a la capacité d'apporter le savoir-faire, la technologie, les ressources financières et la vision stratégique indispensable à la pérennité de cet outil et donc à ses retombées directes ou indirectes pour notre économie.

Nos politiques locaux, eux, ne l'ont pas, et ce pour des raisons évidentes :
- leur vision est marquée par le court terme, celui de la prochaine élection. 
- Ils ne raisonnent pas en fonction de l'avenir à long terme de l'entreprise mais de promesses démagogiques envers leur électorat.
- Face à une crise, ils n'auront pas le courage de prendre les décisions responsables nécessaires et préféreront la démagogie à la prudence financière.

Or, l'activité du Nickel est cyclique. On a connu les années de vache maigre à la SLN, et si elle est encore là, c'est bien parce que l'opérateur a su prendre les mesures difficiles qu'il fallait quand il le fallait.

Pour aller droit au but: si demain la SLN perd de l'argent, ce ne sera plus à ERAMET de chercher des solutions pour la renflouer en puisant dans ses réserves, mais ce sera à la Nouvelle-Calédonie de le faire, puisqu'elle aura voulu la majorité. Ce qui veut dire qu'il faudra peut-être un jour lever un impôt exceptionnel sur les Calédoniens pour financer les rêves de grandeur de certains.

La SLN n'est pas Enercal ou l'OPT. C'est une entreprise qui évolue sur un marché mondial concurrentiel où les faibles sont mangés par les forts, comme le démontre la concentration du secteur minier depuis dix ans. Si demain la SLN est mal gérée par des élus Calédoniens incompétents, elle finira par s'affaiblir et sera balayée par ses concurrents étrangers. 
Par cupidité on risque bien de tuer la poule aux œufs d'or.

Et si l’on veut des exemples instructifs de la capacité du monde politique local à gérer correctement que l'on regarde Dumbéa-sur-mer, l'ETFPA ou AIRCAL.

Gérer des budgets publics, c'est à dire encaisser comme une rente des recettes fiscales pour les dépenser arbitrairement, est toujours moins risqué que de gérer une opération commerciale qui doit générer ses propres recettes sur un marché compétitif où elle n'a, elle, aucune rente de situation.

Mais il semble que cette leçon, que le monde entier (Asie, Europe, Amérique Latine) a compris depuis longtemps, soit restée volontairement inconnue de notre microcosme politique insulaire.

La tentation des indépendantistes et de Calédonie Ensemble de prendre le pouvoir au sein de la SLN n'est pas motivée par une vision industrielle stratégique mais par un simple appétit de pouvoir.

Les indépendantistes mentent ouvertement quand ils prétendent qu'en prenant la SLN, la valeur ajoutée profitera aux Calédoniens. La preuve en est que la SOFINOR n'a jamais remonté de dividendes vers la province Nord. Les dividendes de la SMSP stagnent au sein de la SOFINOR où ils servent à financer une politique marxiste de détention par le pouvoir politique d'un conglomérat d'entreprises, comme le démontre explicitement le dernier rapport de la Chambre Territoriale des Comptes sur la SOFINOR.

Le modèle que veulent les indépendantistes ce n'est pas de rendre tous les Calédoniens actionnaires de la SLN mais bien de capter, à leur profit, à celui de leur clientèle politique et de leurs propres ambitions politico-économiques, un poids-lourd de l'économie calédonienne et son principal contributeur fiscal (Goro et KNS ne paieront pas d'impôt à la Nouvelle-Calédonie pendant quinze ans grâce à la générosité de nos politiques !).

Et pour ceux qui n'ont toujours pas compris le piège grossier dans lequel les indépendantistes tentent de nous entraîner en proposant que la participation majoritaire au sein de la SLN soit portée par la STCPI, il suffit d'expliquer que la STCPI détenue à 50% par le Nord et les Iles et 50% par PromoSud, est gérée jalousement par la SOFINOR et que statutairement c'est 75% des dividendes qui vont au Nord et aux Iles, le Sud n'ayant qu'un misérable 25% alors que celui-ci regroupe 75% de la population.
Voilà la conception de l'intérêt général qu'on essaie de nous vendre.

Moralité :

1. Paradoxalement l’intérêt général du peuple calédonien sera mieux défendu par une entreprise majoritairement privée qui paye ses 35% d'impôt sur son résultat, que par une SEM publique qui ne remonte jamais ses dividendes sur la collectivité et qui capte la richesse pour un petit nombre.

2. La meilleure façon de donner à la SLN toutes les chances d'être encore là dans 15 ou 20 ans, c'est de ne surtout pas confier sa gestion à des politiques dont vous ne savez même pas s'ils seront là dans 5 ans, mais de laisser ceux qui ont la connaissance des marchés internationaux concurrentiels faire leur métier.



*Concernant le mythe indépendantiste des 51% dans l'Usine du Nord, se référer aux documents publiés par Xstrata sur son propre site mondial.
Il y est clairement indiqué que Xstrata financera au moins 80% du projet en échange d'une quote-part proportionnelle du cash-flow dégagé par l'entreprise (les dividendes en fait) pendant les 25 premières années !

http://www.xstrata.com/content/assets/pdf/xni_speech_201011171.en.pdf

"Total forecast project capital cost of $3.85B, with ~$2.3B of spending to-dateXstrata guarantees the full funding amount of the Project, independently of other funding sources
SMSP funding support: ~$350M in equity and debt contributions
French Government Assistance via the “Loi Girardin” tax support scheme of up to ~$200M 

Xstrata funds the remainder in return for proportionate share of cash flows for initial 25 years of operation"

"we have increased our estimate of its capital cost to $5 billion, of which Xstrata’s share is $4.6 billion after funding from our partners SMSP and the French State. Koniambo was originally approved at a capital cost of $3.85 billion in 2007."

http://www.xstrata.com/content/assets/pdf/xta-ir2011_en.pdf